lundi 28 mai 2018

Compression déguisée chez AstraZeneca

En février dernier, AstraZeneca (AZ), le géant pharmaceutique britannique, voit son agrément expirer et son avenir professionnel en Algérie conditionné par un redéploiement en conformité avec la loi ou, à défaut, disparaître. Immédiatement et sans préavis, 153 employés se retrouvent confrontés à un avenir incertain dont ils ne sont nullement responsables. Le fait qu’AZ n’a pas développé son programme en Algérie et que l’Etat n’a pas prévu la protection des emplois dans pareil cas place le personnel dans une situation de précarité qui va vite virer au cauchemar. En effet, et après plus d’un mois de mise en congé payé, les employés se voient contraints par l’employeur de démissionner de chez AZ pour être repris par un prestataire. Cette option est jugée «abusive» par les employés qui voient leur statut de CDI menacé. «Cette démission obligatoire devrait permettre à AstraZeneca de reprendre ses activités de promotion médicale en passant par un prestataire - Clinica Group - en attendant la création d’une entité AZ algérienne légale, avec un contrat de travail qui, en apparence, semble protéger les acquis des employés, mais qui n’en protège pas plus leurs CDI et leur avenir professionnel», explique S. A., l’une des plus anciennes cadres. Les employés estiment alors qu’il y a beaucoup trop de «si» dans les clauses du contrat qu’on leur propose et affichent leur refus. Les deux tiers expriment ce refus par vote et le 22 avril, lors d’une assemblée générale des employés, des représentants sont élus pour négocier un autre accord. Un conflit collectif employés/employeur débute. Des séances de négociations ont lieu, mais sans succès. «L’employeur résiste à s’engager pour l’établissement d’un accord collectif permettant un transfert des employés sans démission vers le nouvel employeur», explique encore O. A., un autre cadre vendeur. Le conflit s’enlise en dépit de l’accompagnement par l’Inspection du travail d’Alger, qui au début affichait une résistance aux manœuvres de l’employeur. Mais cette attitude va vite virer au profit de ce dernier, affirment encore nos interlocuteurs. Le 2 mai, l’Inspection du travail refuse de recevoir les employés collectivement. C’est le début d’une mise à l’écart des représentants par l’employeur dans cette partie de jeu d’échecs. AZ passe à l’offensive et envoie des fiches de vœux à l’insu des représentants, proposant le transfert sans conditions ou une séparation à l’amiable, deux options à l’avantage de l’employeur, estiment les représentants, et préjudiciables aux employés, d’autant que le refus est sanctionné par un licenciement pur et simple. Le plan social est donc engagé avec un minimum de frais pour AZ. Entre-temps, «plusieurs requêtes demeurent sans réponse de la part de l’inspection et aucun courrier envoyé à l’employeur n’a été notifié aux représentants». L’attitude de l’Inspection du travail d’Alger, basée aux Bananiers, est perçue comme une trahison par les employés qui se retrouvent dos au mur, en dépit de tous leurs efforts pour déjouer ce plan machiavélique. Ces employés, des pères, des mères et des chefs  de famille, n’ont jamais souhaité démissionner et se retrouvent contraints de subir «les conséquences d’une mauvaise gestion et de la négligence de la part des dirigeants de la société qui, pour des raisons de plus en plus évidentes, ont laissé expirer son agrément sans en informer les employés et n’ont à ce jour entamé aucune procédure pour la création d’une entité algérienne légale», regrette S. A. qui se décide avec beaucoup d’autres à défendre leurs droits devant un tribunal. A noter que le laboratoire Pierre Fabre, confronté à la même situation en Algérie, a su négocier ce virage et protéger ses employés.  

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