Le procès des 26 personnes accusées d’appartenance à l’Ahmadisme (mouvement réformiste musulman et messianiste fondé par Mirza Ghulam Ahmed à la fin du XIXe siècle au Penjab), comparaissant sous les chefs d’accusation d’«offense à l’islam», de «constitution illégale d’association» et de «collecte illégale de cotisations» s’est tenu hier au tribunal d’Akbou en présence de nombreux avocats ainsi que des observateurs de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme, représentée par Saïd Salhi et Hocine Boumedjane. Appelés individuellement à la barre, les prévenus ont eu à répondre essentiellement à des questions portant sur leur date d’adhésion au mouvement ahmadi, de la collecte d’argent, de leur fonction au sein de la supposée association, des lieux de prière collective ainsi que leur relation avec Amessis Hocine, présenté comme le premier responsable de la branche ahmadie dans la wilaya de Béjaïa. Au terme des auditions des prévenus, le procureur de la République est intervenu pour requérir «six mois de prison ferme ainsi que 20 000 DA d’amende» pour chacun des prévenus. Premier avocat de la défense à prendre la parole, Salah Dabouz a souligné que ce sont des citoyens appartenant avant tout à «un courant de pensée» qui se retrouvent au box des accusés, comme ce fut le cas ces derniers temps à travers 31 wilayas. «Il faut qu’ils aient commis un acte ou une action illégale ou qu’il y ait une plainte pour poursuivre des citoyens devant la justice. Dans le cas présent, il n’y aucun acte de ce type dans le dossier. Il n’y a pas d’acte non plus dans le chef d’accusation d’atteinte à l’islam en ce sens qu’il n’y a ni discours insultant, ni caricature, ni un quelconque document portant atteinte au Prophète ou à la religion», a déclaré maître Dabouz en insistant sur le fait que l’Ahmadisme est une école de pensée et qu’au final la présente affaire relève tout simplement de la liberté de penser. Maître Sofiane Ikken a été le deuxième avocat à monter au créneau pour axer son plaidoyer sur le principe de la liberté de culte garantie par la Constitution du pays : «Les gendarmes qui ont auditionné les prévenus sont allés très loin au point de les questionner sur leurs convictions religieuses et leurs sentiments profonds. C’est tout simplement de l’inquisition. Nul n’a le droit d’interroger un citoyen sur sa foi, sur ce en quoi il croit ou ne croit pas. Des lignes rouges ont été franchies.» Les autres avocats, maîtres Belamri et Hemaili, qui se sont succédé à la barre se sont également attelés à prouver qu’il s’agit de citoyens ordinaires, résolus à vivre leur foi et leur spiritualité selon leurs propres convictions et qui ne menacent en aucun cas la stabilité du pays ou les convictions de leurs concitoyens. Il est à noter qu’au vu de la trop grande légèreté des pièces à conviction présentes dans le dossier – essentiellement des procès-verbaux d’audition réalisés dans les locaux de la gendarmerie – les avocats ont demandé l’abandon pur et simple des charges retenues et l’acquittement des prévenus. Au terme d’un procès qui a duré près de deux heures et demie, le jugement a été mis en délibéré et le verdict est attendu pour le 12 juin prochain. Toutefois, au sortir de la salle d’audience, les avocats de la défense se sont montrés très optimistes, s’attendant à un verdict clément qui ne retiendra que l’amende symbolique.
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