lundi 14 mai 2018

«Le silence du Président dans cette crise risque de devenir complice»

Très actif dans la crise née du blocage des équipements industriels destinés à l’usine de trituration de graines oléagineuses du groupe Cevital, Mourad Bouzidi, porte-parole de la CCSTC, qui appelle à une marche citoyenne aujourd’hui à Béjaïa, estime que «le mutisme du président de la République confirme que les institutions de l’Etat sont l’otage de lobbies». Entretien réalisé par Hacen Ouali Plus d’une année que l’investissement du groupe Cevital est bloqué à Béjaïa. Selon vous, pourquoi le gouvernement n’agit pas pour débloquer cette situation ?   Le silence du Premier ministre devant les interpellations des députés lors de la présentation de son programme, l’esquive du ministre des Transports face aux questions des journalistes et parlementaires de la région lors sa dernière visite à Béjaïa, et enfin le mutisme du président de la République confirment que les institutions de l’Etat sont l’otage de lobbies. Les agitations du directeur du port de Béjaïa ne sont l’effet que des ombres chinoises de ses parrains. Le président de la République et le Premier ministre sont plus que jamais interpellés et doivent assumer leurs responsabilités. Ils doivent vite agir pour débloquer une situation qui n’a que trop duré. Le silence des plus hautes autorités du pays est très mal perçu par toute l’opinion publique. Ce blocage injustifié envoie à l’étranger une très mauvaise image du climat des affaires dans notre pays. Ce silence risque de devenir coupable, voire complice d’une injustice dont les conséquences risquent d’être désastreuses pour l’économie de notre pays. Quel est le manque à gagner pour l’économie nationale ? Dans cette affaire se joue une bataille entre l’Algérie qui produit, crée de l’emploi et génère des devises à travers les exportations contre ceux qui veulent faire de l’Algérie un pays importateur de tout ce qu’il consomme. L’Algérie qui importe et qui vit de la commande de l’Etat ne crée rien, c’est une économie parasitaire qui a englouti 1000 milliards de dollars pour être réduite au bout du compte à actionner la planche à billets, sans quoi les salaires de novembre passé ne pouvaient pas être assurés. Le projet d’usine de trituration est très important car l’Algérie importe la totalité de l’alimentation du bétail, le tourteau de soja. C’est un projet ambitieux qui offre au pays nombre d’avantages économiques et financiers. En plus de la création de 1000 emplois directs, le projet de Cevital aura un effet d’entraînement certain sur l’agriculture par le développement des cultures des graines oléagineuses et provoquera un regain d’intérêt chez nos agriculteurs pour l’exploitation des terres laissées en jachère. Avec la garantie d’un débouché pour les récoltes et l’assurance d’une stabilité de l’activité, ce seront plus de 100 000 emplois indirects qui verront le jour dans le secteur agricole. Le projet assurera également les besoins de notre pays en matière d’huiles végétales brutes et de tourteaux de soja, entièrement importés aujourd’hui pour un coût de 1,5 milliard de dollars par an. Il contribuera ainsi grandement à la sécurité alimentaire de notre pays, un enjeu dont l’importance n’est plus à démontrer. Mieux encore, avec ce projet, l’Algérie pourra enfin prétendre au statut d’exportateur en dégageant un excédent de 1,5 million de tonnes qui sera destiné aux marchés extérieurs d’une valeur de 750 millions de dollars. Au total, la balance des paiements du pays bénéficiera chaque année de 2,25 milliards de dollars. Avec ce blocage, quel est l’investisseur qui va encore s’aventurer à envisager de s’installer à Béjaïa ou même simplement de penser à faire débarquer ses marchandises dans le port de Béjaïa, sachant qu’il aura affaire à un directeur de port qui bloque les investissements et qui traite de manière aussi indécente le plus grand investisseur du continent, pour reprendre les termes mêmes utilisés par le Premier ministre. Le DG du port a fait du port de Béjaïa une place tristement célèbre parmi les sites portuaires de la Méditerranée. Y a-t-il d’autres projets bloqués dans la wilaya de Béjaïa ?   De nombreux projets sont bloqués à leur naissance. Nous ne pouvons tous les énumérer. Il y a le gel de quelque 143 projets pour un montant de trente milliards de dinars algériens. Pour illustrer cela, je veux citer le projet du complexe pétrochimique, dont la mise en service était prévue en 2018, qui a fini lui aussi par être abandonné malgré les atouts dont il dispose : port et aéroport à proximité et existence d’un pipeline et d’un gazoduc. Il y a lieu de souligner que le choix du terrain a été effectué pour ce projet et qu’un projet de raffinerie a été déjà attribué à notre wilaya, mais curieusement délocalisé en 2005 vers une autre région.   

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire