jeudi 3 mai 2018

Les raisons d’espérer

Soumise à rude épreuve et son monopole sérieusement disputé, la presse écrite résiste. Tient la barricade de l’information. Mais est-ce une raison pour ne pas se soucier de son devenir ? On n’en finit pas de prononcer son oraison funèbre. La mort de la presse écrite. Le boom numérique avec son flux ininterrompu d’informations submergeant – la crise économique «aidant» – était annoncé comme un nouveau modèle devant se construire sur les décombres d’un ancien. Comme au temps de l’apparition de la radio et la télé, on jure encore sur la disparition certaine de la presse papier. Il n’en est rien. Certes, soumise à rude épreuve et son monopole sérieusement disputé, la presse écrite résiste. Tient la barricade de l’information. Mais est-ce une raison pour ne pas se soucier de son devenir ? Sa pérennité n’est pas définitivement acquise, d’autant qu’elle évolue dans un environnement politique et économique aussi hostile qu’instable. Il pèse sur elle des menaces permanentes. D’abord les restrictions d’ordre politique qui rendent difficile l’exercice du journalisme indépendant. Elles se déclinent sous diverses formes. Pressions judiciaires et chantages économiques. Faut-il rappeler ici les conditions tragiques qui ont présidé à la naissance de la presse indépendante en Algérie. Les médias qui refusent de céder sur l’un de leurs principes fondateurs – l’indépendance éditoriale – sont la cible d’attaques orchestrées et souvent pernicieuses. En faisant la guerre à la presse indépendante, le pouvoir politique non seulement se trompe de bataille, mais il piétine un droit fondamental du citoyen : le droit à l’information. La liberté de la presse n’est pas un privilège accordé aux journalistes, mais un droit à l’expression libre de toute la société dans ses divers courants d’opinion. Le pouvoir politique porte une grande responsabilité dans l’état désastreux de la presse.  Cependant, cette situation ne doit pas dispenser les professionnels de la presse d’un examen critique. Un devoir d’inventaire est plus que nécessaire pour qu’ils puissent assumer leur part du combat pour la démocratie. La première des urgences est de bâtir des entreprises de presse pérennes, solides et surtout adaptées à un monde économique en mouvement. L’aspect matériel de la fabrication du journal va de pair avec l’ambition éditoriale. Et c’est pour cela que la mère des batailles réside dans l’information crédible, de  qualité et d’un contenu rigoureux. La crise économique est surmontable. Mais la plus redoutable des crises est celle de la confiance. Une fois rompu, il est difficile de renouer avec ce lien de confiance qui lie la presse à ses lecteurs. Pour le garder, il faut sans cesse rester collé à leurs préoccupations et traduire au mieux leurs aspirations. Vivre au rythme des palpitations sociales et sociétales. Etre en phase avec les dynamiques en cours. La presse doit être l’espace où s’expriment librement les opinions, où s’exerce la liberté de penser. Elle doit rester cette belle aventure intellectuelle qui agite avec audace les idées, interpelle les consciences et malmène tous les archaïsmes. Qui soulève les problématiques dérangeantes et qui interroge son temps. Le risque qui guette le journalisme, c’est sa banalisation. Sa fonctionnarisation. D’où la nécessité de repartir sans cesse et avec la même ardeur à la quête des bonnes et mauvaises nouvelles. Livrer des informations fiables et complètes, permettre le décryptage des faits. La presse écrite survivra à toutes les épreuves, parce qu’elle est une vigie au service de la société. Elle est l’ADN de la démocratie à construire. Et par dessus tout, elle est une mission historique qu’il faudra assumer avec une passion chevillée à l’âme. Celle de prendre part à une construction permanente de l’histoire. Et c’est en ce sens que le journalisme est un combat.                               

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