mercredi 2 mai 2018

Les résidents campent sur leurs positions

La décision d’arrêter les gardes a été prise après l’échec des négociations avec la tutelle (ministère de la Santé) et la violente répression policière de la dernière marche des «camristes» à Alger. Les résidents en sciences médicales ont mis à exécution leur menace d’arrêter les gardes dans les urgences. «Il y a un grand taux de suivi. C’est la quasi-majorité qui a répondu à notre mot d’ordre d’arrêt des gardes», constate le porte-parole du Collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra), Mohamed Taileb. Le mouvement est largement suivi dans tous les établissements du pays où les résidents interviennent. Dans la wilaya de Tizi Ouzou, le Camra local précise que toutes les structures ont été désertées par les résidents, CHU Nedir Mohamed, l’unité de Belloua, la clinique de gynécologie-obstétrique Sbihi Tassadit, l’EHS Fernane Hanafi de Oued Aissi et l’établissement de chirurgie cardiaque de Draâ Ben Khedda. «Il y a quelque 700 résidents dans notre wilaya, derrière les grands pôles d’Alger, Oran, Constantine. Le taux de suivi est de 100%. Les gardes ne sont plus assurées depuis le 29 avril, et depuis trois ou quatre jours auparavant à Constantine et Oran», précise le représentant local des résidents et membre du bureau national du Camra, Sofiane Benseba. La décision d’arrêter les gardes a été prise après l’échec des négociations avec la tutelle (ministère de la Santé) et la violente répression policière de la dernière marche des «camristes» à Alger. «Ce n’est pas une décision qui a été prise à la légère. La décision a été prise à contrecœur», signale le porte-parole Taileb, qui regrette le «mutisme» du ministère qui s’est contenté d’inviter les délégués à une rencontre, la veille de l’exécution de l’appel du Camra, «sans préciser l’ordre du jour ni la composante de l’autre partie». Devant l’absence de réaction des délégués, le département du Pr Mokhtar Hasbellaoui a ordonné la réquisition des grévistes et des autres médecins en application des articles 41 et 42 de la loi 90-02 portant sur le service minimum. «L’hôpital a l’obligation d’assurer la continuité des services publics essentiels et ne doit en aucun cas interrompre les soins, particulièrement pour les malades hospitalisés et les activités d’urgence», précise le document adressé aux DSP et aux directeurs des établissements. Pour Taileb, le résident n’est pas un fonctionnaire et n’est donc pas astreint aux gardes et au service minimum, mais reste un étudiant en post-graduation, aux termes de l’ordonnance n° 06-03 portant statut général de la Fonction publique et le décret exécutif n°13-195 relatif à l’indemnité de garde au profit des personnels des établissements publics de santé. «Le médecin n’est pas censé assurer la garde, et faire fonctionner les services comme il l’a toujours fait. La loi l’oblige à travailler sous la couverture d’un médecin senior (professeur, maître-assistant et assistant)», précise le Dr Benseba, qui dénonce «l’absence de solidarité» des syndicats des enseignants (Snechu), des généralistes (SNMG), des spécialistes (SNPSSP), à l’exception du SNPSP présidé par le Dr Merabet. Menace de démission collective Les procureurs de la République, saisis sur la légalité de l’action du Camra, ont refusé de prononcer la réquisition des grévistes. «La loi ne le leur permet pas», tranche le Dr Taileb. Face à la désaffection des résidents, les directeurs d’établissement ont dressé des listes de garde de médecins généralistes affectés dans les services des urgences. «Pour aujourd’hui, on a reçu quelques blessés (lésions, fractures…). L’affluence n’est pas importante, on a assuré quelques consultations», signale un médecin du SAMU du CHU Nedir Mohamed qui «roule avec deux médecins». Pour le Camra, la situation actuelle dans les différents services (urgences médicales, chirurgicales, pédiatrie et gynécologie) dénote la «défaillance» du système de santé qui «repose de tout temps sur des résidents». «La situation de défaillance est inquiétante, et c’est juste à côté, dans les grands hôpitaux des grandes villes du pays. Tout repose sur nous. Alors que rien ne justifie que nous assumions une telle responsabilité», relève le Dr Taileb. Pour le porte-parole et ses camarades, les résidents ont de tout temps été livrés à eux-mêmes. «A Blida, un résident a été condamné à une peine 18 mois de prison ferme, assortie de 5 ans de radiation de l’exercice de la profession, pour avoir pris la décision d’évacuer un enfant en pédiatrie alors qu’il avait pris, selon lui, la décision de consulter son maître assistant», constate-t-il. Le Camra, précise-t-on, a réclamé un plateau technique adéquat, la sécurisation du lieu de travail, des brancardiers... «On fait face à l’absence d’un centre de tri, puisque les patients reçoivent dans les urgences le même traitement, qu’ils aient un infarctus ou une grippe. Les services ne disposent ni d’agents de sécurité ni de réceptionnistes. C’est le médecin, censé accueillir les malades, qui ouvre les portes ou prend les bilans d’un service à un autre. La chambre de garde, si elle existe, est insalubre. Il y a aussi l’absence de transport…», détaille le porte-parole. La situation risque de se compliquer dans les prochains jours pour les patients. Le souhait du Camra est de «voir intervenir les hautes autorités», signale le Dr Benseba. «Si des réponses ne sont pas apportées jusqu’en milieu de semaine, les discussions sont en cours pour une 'feuille de route' afin d’évaluer nos actions et celles à prendre à l’avenir», signale-t-il. La menace d’une démission collective n’est pas exclue, met en avant le Dr Taileb.

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